Description
Prairies : à chacune son bon usage
Si le pâturage est la technique d’exploitation de l’herbe la plus économique, certaines contraintes remettent parfois en cause son intérêt au sein d’un système fourrager herbager. Or, pour qui sait identifier les atouts et contraintes spécifiques à chaque parcelle de pâturage, il est possible d’adapter la technique d’exploitation plutôt que de vouloir changer le type de flore. De nouveaux bénéfices peuvent apparaître à l’issue de ces adaptations.
Précocité et souplesse d’exploitation
Dans les milieux fertiles et abrités, le démarrage de végétation est souvent précoce au printemps (à partir de 200 degrés jour). La flore s’est adaptée au milieu. Il est possible d’y
pâturer très tôt (à partir de 300 degrés jour) si la portance est là.
En conditions moins favorables, le démarrage de végétation est plus tardif. Des graminées moins productives colonisent le milieu. Une flore plus diversifiée peut y trouver sa place. Ce type de prairie a un démarrage de végétation décalé (400 degrés jour), reste vert plus longtemps, ce qui lui donne une bonne souplesse d’exploitation.
L’éleveur peut combiner efficacement ces deux types de prairies pour augmenter la durée du pâturage : « lâcher plus tôt, et bénéficier d’une herbe de qualité plus longtemps ».
Qualité nutritive pour les herbivores
L’herbe verte pâturée reste la première source de protéines pour les herbivores. Elle est également très énergétique. L’éleveur doit faire en sorte de mettre à disposition des animaux
aux plus forts besoins les prairies dont les temps de repousse n’excèdent pas 3 à 6 semaines selon la période de l’année et le type de flore dominante.
Les animaux qui ont des besoins nutritionnels moins élevés peuvent valoriser de l’herbe à un stade plus avancé.
Intérêts sensoriels et nutritionnels
De par la qualité et la diversité de la flore qui les composent, les prairies portent des services d’intérêts sensoriels pour les consommateurs.
- Les prairies les plus diversifiées pâturées transmettent des composés aromatiques (terpènes) que l’on retrouvera dans les fromages par exemple.
- Les prairies les plus fertiles pâturées régulièrement et précocement sont riches en caroténoïdes, et donneront une couleur plus jaune aux produits laitiers.
- Les prairies feuillues sont riches en acides gras poly-insaturés et en composés phénoliques au pouvoir anti-oxydant. Ces deux atouts sont d’intérêt pour la santé humaine. Finir les
animaux à l’herbe est ainsi intéressant. - Plus la diversité floristique est marquée et plus l’herbe est jeune, plus ces composés sont présents.
Des conseils pour réussir
- Identifier les types de prairies présents sur l’exploitation avec leurs contraintes et leurs atouts.
- Penser aux conditions matérielles pour rendre accessibles aux différentes catégories d’animaux des surfaces qui ne l’étaient pas (chemins, clôtures, points d’eau, ombre, taille de parcelle, distribution de fourrages complémentaires).
- Repenser l’utilisation de certaines prairies (alternance fauche – pâture, déprimage).
- Préserver la diversité pour gagner en souplesse d’exploitation :
- Organiser la chronologie de la mise à l’herbe en fonction des démarrages de végétation plus ou moins échelonnées selon le type de prairie.
- Les prairies permanentes sont souvent plus portantes que les prairies semées.
- Les prairies les plus diversifiées et riches en légumineuses sont les plus souples d’exploitation.
- Les prairies les plus fertiles sont nécessaires car elles ont une meilleure capacité de repousse.
- Les prés les plus humides sont souvent les derniers à avoir de l’herbe verte en plein été. Ils permettent de prolonger le pâturage quand les autres parcelles sont grillées.
« On ne voulait plus amener les vaches laitières en estives en été. Depuis qu’on a appris l’impact positif que ces prairies ont sur la qualité et la spécificité des fromages de notre zone AOP, on s’y est remis ! On repense complètement l’organisation du travail autour de la valorisation de ces surfaces »
Gaec de l’oiseau à Murol (63)
Impacts pour la durabilité
- Pâturer plus longtemps, c’est moins d’aliments et d’engrais achetés, moins de refus, moins de complémentation.
- Utiliser à bon escient le panel des diversités existantes de prairies est un bon moyen de maintenir la biodiversité.
- Tirer partie de cette diversité tout au long de l’année révèle le savoir-faire remarquable des éleveurs.
Quelques références
- Prairies permanentes. Des références pour valoriser leur diversité – Institut de l’élevage, 2011
- Typologie multifonctionnelle des prairies – Pôle fromager AOP Massif Central, 2011. www.prairies-aoc.net